La littérature, le sens de la beauté et le rapport au monde.

Entretien avec Maï-Do Hamisultane

Par Noureddine Mhakkak

Maï-Do Hamisultane est une écrivaine franco-marocaine. Après une enfance passée entre le Cap d’Antibes et Casablanca, elle étudie en classe préparatoire hypokhâgne et khâgne BL au lycée Janson-de-Sailly à Paris. Elle entreprend ensuite des études de médecine et devient psychiatre.

Elle a écrit plusieurs romans primés et traduits (La Blanche, Santo Sospir, Lettres à Abel, Des Réalités). Elle collabore également à différents projets artistiques (Biennale de Bamako, textes d’exposition). Elle vit actuellement à Paris. Bonne lecture.

Que représentent les arts et les lettres pour vous ?

Notre vitalité́, pour ainsi dire notre façon de se savoir au monde et de l’être. Après, nous avons chacun notre façon d’être vivant ; le rapport à l’art et aux lettres est singulier. Par les arts et les lettres, une insolence sublime face aux vicissitudes de la vie et l’inconnu de la mort, nous est permise. 

Dans cette période d’épidémie, ils sont essentiels car ils apprennent à affronter l’inévitable.

Que représente l’écriture pour vous ?

Le rapport à l’écriture n’est pas figé, il évolue avec le temps. 

Avant d’exercer mon métier de psychiatre, l’écriture m’était absolument nécessaire, autant que la respiration. 

Maintenant, il est plus apaisé.  Mes derniers textes sont très différents. On parle de périodes pour les peintres, pourquoi ne pas en faire de même pour les auteurs ? 

La lecture pour vous ?

Elle fait partie de mes rituels de vie. Je ne conçois pas un jour sans lire un peu. 

Même si en ce moment, je lis surtout des livres ayant trait à la psychiatrie, ou ceux que mes patients ou mes proches m’offrent. 

Je trouve intéressant de distinguer rapport à la l’écriture / rapport à la lecture, alors que moi j’aurais parlé d’emblée de rapport aux livres, à la littérature.

J’ai grandi parmi les livres, dans une maison d’écrivains, c’est peut-être pour ça qu’elles m’apparaissent indissociables. 

Parlez-nous des villes que vous avez visitées et qui ont laissé́ une remarquable trace dans votre parcours artistique.

Tanger, Marseille, Trouville et Casablanca. 

Des villes aquatiques à l’horizon impénétrable, et où les éléments écrasent le paysage. 

J’aime le vertige mystique de ces villes qui sont pour moi interconnectées, par les imaginaires.

Que représente la beauté́ pour vous ?

 L’émerveillement, une sorte d’apparition qui ravit à soi-même.

Je trouve la littérature pleine de beauté en ce sens qu’elle frappe parfois par sa lucidité qui va à l’encontre du rationnel.

Dans Une vieille maîtresse, le prince préfère son aînée à la jolie princesse.

Dans Les Braises de Sándor Márai c’est plus l’analyse de l’amitié et de l’amour que l’écriture sublime, qui fait pour moi toute la beauté du roman. 

La beauté c’est aussi l’esthétique de ramener l’être humain dans une dignité, parfois à l’encontre du monde sensible. 

J’aime beaucoup Ricœur et son concept d’identité narrative qui permet cela.

Parlez-nous des livres /films que vous avez déjà̀ lus/vus et qui ont marqué́ vos pensées.

Les livres forment notre rapport au monde.

Le marin de Gibraltar, Les yeux bleus cheveux noirs, le film de Jim Jarmusch Paterson sont de ceux qui ont pu influer mon rapport à l’amour.

Parmi les œuvres qui ont pu marquer mon rapport à la psychiatrie, Le film Tetro, L’Aliéniste de Machado de Assis, le livre d’Harold Searles L’Effort pour rendre l’autre fou, Fanon Fanon et Fanon, et peut-être tout ce que j’ai vu, lu, entendu aussi… 

 Autrement, Je suis une fan absolue du cinéma de de Faouzi Bensaïdi et de celui Desplechin.

Ceci dit, on m’a offert récemment les Considérations inactuelles de Nietzsche. Peut-être que sa lecture va tout changer ! 

Parlez –nous de vos projets culturels /Artistiques à venir.

Un roman, mais je n’en dis pas plus ! 

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