Somalie : Rien ne va plus entre le Président et son Premier ministre

Attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

« Le Premier ministre a violé la Constitution de transition de sorte que ses pouvoirs exécutifs lui sont retirés (…), notamment ses pouvoirs de destitution et/ou de nomination de dirigeants jusqu’à ce que les élections aient eu lieu». Tels sont les termes du communiqué de la présidence somalienne en date du 16 septembre indiquant que la tension entre le chef de l’Etat Mohamed Abdullahi Mohamed, dit « Farmajo »,  et son Premier ministre Mohamed Hussein Roble, a pris un tournant qui fragilise encore plus le pays en ce moment où rien ne permet de savoir si les élections parlementaire et présidentielle prévues en Octobre vont pouvoir se tenir à la date fixée.

Le président somalien reproche à son Premier ministre d’avoir pris, de manière unilatérale, «des décisions imprudentes pouvant ouvrir la voie à l’instabilité politique et sécuritaire » sans même prendre la peine de le consulter en sa qualité de supérieur hiérarchique. 

Les relations entre les deux hommes, déjà tendues depuis plusieurs mois, ont atteint leur paroxysme ces dix derniers jours quand ceux-ci se sont opposés, à deux reprises, à propos de limogeages et de nominations à des postes cruciaux de l’appareil sécuritaire.

Ainsi, le 5 septembre dernier, le Premier ministre avait unilatéralement procédé au limogeage du chef de l’Agence des services de renseignement et de sécurité (NISA),   Fahad Yasin, un intime du président Farmajo auquel il reproche d’avoir mal géré une enquête portant sur la disparition inexpliquée d’Ikran Tahlil, une agente de la NISA.

Aussi, en considérant comme étant « illégale et inconstitutionnelle », la décision prise par le Premier ministre, le Président Farmajo a immédiatement procédé à son annulation, promu Fahad Yasin au rang de conseiller à la sécurité nationale et attribué son ancien poste à une tierce personne choisie par lui.

En outre, après avoir accusé le président d’ « entraver » l’enquête et jugé que ses décisions constituent une « menace existentielle dangereuse » pour le pays, le Premier ministre avait procédé au remplacement du ministre de la Sécurité ; une décision jugée, par le Président, comme étant non conforme à la Constitution.

Pour rappel, le président Farmajo qui avait été élu en 2017 et dont le mandat avait expiré le 8 Février 2021 n’avait pas pu s’entendre avec les dirigeants régionaux sur la tenue d’élections ; ce qui avait déclenché une grave crise constitutionnelle qui, au lieu de se dissiper, à la suite de l’annonce, en avril dernier, de la prolongation de deux années du mandat présidentiel, a, au contraire, donné lieu à des affrontements armés à Mogadiscio qui ont ramené, à la mémoire des somaliens, le douloureux souvenir de ces décennies de guerre civile qui avaient ravagé le pays.

Nommé Premier ministre, en Septembre 2020, puis chargé, par le président Farmajo, en mai dernier, de l’organisation des élections, Mohamed Hussein Roble a pris, depuis lors, le devant de la scène politique principalement lorsqu’il est parvenu à un accord sur un calendrier électoral, avec pour horizon initial, l’élection du président le 10 Octobre prochain.

Or, bien que des responsables politiques somaliens aient essayé, à plusieurs reprises, de désamorcer les tensions entre les deux hommes, leurs tentatives furent vaines et, dans un rapport publié mardi, le Centre de réflexion « International Crisis Group » (ICG) a déclaré, à titre de mise en garde, que « les factions somaliennes jouent avec le feu ». Jusqu’à quand ?

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