Un pacte de migration «sans contraintes»

La montagne aurait-elle accouché d’une souris ? S’il est très tôt pour tirer une telle conclusion, l’on ne peut pas non plus s’empêcher de s’interroger sur le «poids» du texte du «Pacte pour la migration» qui a été adopté vendredi dernier.

Si l’ensemble des déclarations sur ce Pacte, qui sera signé à Marrakech en décembre prochain, saluent le «consensus construit» autour de la migration, deux déclarations de Louise Arbour, représentante spéciale des Nations Unies pour les migrations internationales, interrogent toutefois voire inquiètent, tant ce Pacte a nourri des espoirs. Surtout eu égard à la bataille acharnée que se livrent les pays de l’Union Européenne; certains privilégiant des solutions pour le moins que l’on puisse dire, «paranoïaques», plongeant la planète toute entière dans l’indignation.

S’il est vrai que le texte du Pacte n’a pas été rendu public, quelques déclarations sur son contenu permettent toutefois de s’en faire une idée. Ainsi, le Pacte, que l’on espérait remettre les pendules à l’heure en matière de gestion de la migration irrégulière, ne pourrait s’agir de rien d’autre que d’un «document non contraignant», selon les propos de Louise Arbour.

En d’autres termes, il n’obligerait pas vraiment les Etats, surtout ceux concernés par les flux migratoires, à sortir de leurs «zones de confort» et à gérer les flux migratoires selon une seule et même approche. On l’aura compris, le Pacte ne force en rien les Etats à adopter des politiques nationales en matière de migration. Ce qui explique donc pourquoi un consensus a finalement été construit, alors qu’au cours des 18 derniers mois ayant suivi l’adoption de la «Déclaration de New York», la manœuvre était difficile, chaque pays voulant préserver sa Souveraineté sur la question.

L’inquiétude serait donc de savoir comment l’ONU va réconcilier les discours «inhumains» de certains Etats, pour assurer une gestion commune de la migration, comme le prétend l’objectif principal du Pacte ? Si les Etats préservent leur souveraineté sur la gestion de la migration, malgré le Pacte, les USA qui ont quitté ledit accord pour la même raison, seraient-ils réellement à blâmer ? Peu après l’adoption du texte du Pacte, à titre d’exemple, des ONG ont critiqué le langage «peu ferme» du Pacte sur la détention des mineurs. Le pacte déclare qu’elle pourrait intervenir «en dernier recours». Ce qui n’est pas anodin, puisque cette question était une « ligne rouge» pour de nombreux Etats. Et pourtant les ONG auraient souhaité une interdiction totale de cette pratique.

Si le langage du texte manque de fermeté et est loin d’être parfait, comme l’a si bien rappelé Louise Arbour, ce Pacte constitue toutefois un «pas en avant» puisque c’est la première fois que les 194 Etats membres de l’ONU tentent de bâtir un consensus sur la question migratoire. Pour la suite, «il faudra ouvrir le débat de manière progressiste… et insuffler un vent de concrétisation» aux 23 engagements de ce texte.

Danielle Engolo

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