Femme et médias au Maghreb, où en sommes-nous?

Dans les pays du Maghreb, les femmes sont souvent moins présentes et mal présentés dans les différents supports médiatiques qui continuent à insister de plus en plus sur les stéréotypes et sur les différenciations stéréotypées du genre.

L’inégalité hommes-femmes est toujours présente dans les médias des pays du Maghreb, elle se concrétise principalement par le fait que les femmes sont beaucoup moins présentes par rapport aux hommes dans le contenu médiatique produit par les différents médias et que le point de vue féminin est souvent marginalisé.

Les médias ont le pouvoir d’influencer fortement la perception de leur public vis-à-vis des deux sexes et de façonner l’identité sexuelle et la construction sociale du genre. Mais pour que leurs productions soient facilement et rapidement reçues et assimilées par un large public, ils font toujours appel à l’imaginaire collectif et à des codes culturels communs et faciles à décoder par les téléspectateurs.

Les médias des pays du Maghreb n’échappent pas à cette loi d‘attraction, ce qui explique la représentation stéréotypée et réduite des femmes dans ces médias. Des femmes qui sont des victimes d’une violence pratiquée par les hommes, qui cherchent tout le temps à satisfaire les besoins de leurs maris, qui s’occupent seules des tâches ménagères, ou bien qui sont hypersexualisées dans les publicités. Au Maghreb, Les productions médiatiques continuent à s’inspirer du référentiel arabo-musulman afin de capter l’attention de leur auditoire, ce qui fait que l’image de la femme se trouve coincée entre un référentiel religieux et une construction sociale solide dominée par une culture inégalitaire homme-femme. Un point qui rend difficile le fait de recadrer la problématique de l’égalité entre les sexes dans une société où le discours islamiste est fortement présent, où La culture inégalitaire est dominante et où les contenus médiatiques renforcent les stéréotypes.

Dans le traitement de l’actualité, le point de vue féminin est souvent considéré comme incapable de confirmer, de commenter ou de nuancer une information fait moins l’objet de traitement spécifique et l’image des femmes qui est véhiculée est, le plus souvent, stéréotypée et réductrice. Selon Sahbi Ben Nablia, expert en communication et médias arabes, l ’opinion de la femme en tant que source d’information reste marginalisée et sa voix est réduite. La femme ne figure dans les nouvelles qu’à condition d’être une victime ou bien témoin impliquée directement dans la nouvelle. Elle n’est pas interviewée en tant qu’experte ou bien une source d’information. Le traitement de l’image de la femme dans les médias maghrébins reste donc discriminatoire, dégradant et offensant à son égard. Sa représentation est souvent limitée au rôle maternel et familial. Ils interviennent souvent dans des sujets en relation avec la maternité, la santé, la famille, le bien-être, et rarement dans les débats politiques, l’analyse économique ou bien les sujets scientifiques.

Ainsi, certaines catégories de femmes reçoivent un traitement spécifique et les médias ne leur donnent pas un grand intérêt, ce sont les femmes âgées, les femmes appartenant à des groupes ethniques et religieux minoritaires, les femmes de la classe ouvrière, les femmes rurales et les femmes ayant une autre orientation sexuelle.

Ainsi, dans la publicité les femmes sont très présentes mais en tant qu’illustration ou bien en tant qu’instrument de séduction et des objets de désir où elles se montrent passives et dans des positions inconfortables, contrairement aux hommes qui sont représentés comme actifs ou occupant un poste de décision et une position de pouvoir.

D’ailleurs, Sahbi Ben Nablia affirme que‘‘ Les messages publicitaires renforcent ainsi les inégalités entre les sexes et consolident les stéréotypes ancrés dans les mentalités. Dans la publicité, les femmes sont victimes du sexisme, elles sont représentées dans des rôles traditionnels ou comme de purs objets de désir et de séduction. Leurs capacités intellectuelles sont niées et leurs qualités réduites à des attributs physiques’’. ‘‘Les femmes sont hyper-sexualisées dans la publicité. Elles sont des top-modèles à l’allure impeccable. Les femmes ordinaires menant une vie équilibrée et aux multiples centres d’intérêt ne sont guère représentées dans la publicité’’, ajoute-t-il.

La publicité véhicule, donc, une image négative de la femme qui porte atteinte à sa dignité tout en ignorant ses compétences réelles. Cependant, l’appel au développement d’une culture médiatique égalitaire et globale envers la dignité des femmes est devenu une nécessité et les différents intervenants dans le secteur de la communication et les médias maghrébins sont, donc, invités à repenser la représentation de la femme et le traitement de son image dans leurs productions et à adopter une approche genre dans leurs produits médiatiques.

Le travail des médias dans ce sens a commencé depuis plusieurs années. Le programme d’Action de Beijing élaboré en 1995 lors de la Quatrième Conférence Mondiale des Nations Unies sur les Femmes est devenu la feuille de route et la référence en la matière.

De ce fait, la représentation égalitaire des genres dans les médias et l’amélioration de l’image de la femme est devenue un enjeu de taille pour les médias maghrébins. Au Maroc, la Charte Nationale pour l’Amélioration de l’Image de la Femme dans les médias publiée en 2005, la Déclaration de Rabat sur l’égalité entre les hommes et les femmes journalistes au Maghreb et l’engagement politique, économique et social ainsi que l’élaboration de politiques et de textes de lois visant une promotion réelle de la culture de l’égalité, sont les meilleurs exemples. Aussi, Il est important de rappeler que le Maroc est le premier pays au Maghreb et dans le monde arabe à disposer d’une telle charte qui dénonce la représentation médiatique de la femme qui renvoie à une image stéréotypée de : la femme traditionnelle, la femme guidée, la femme superficielle et la femme victime.

Zaynab Dhimene

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