L’Equateur est débordé par la pandémie…

Après le Brésil, l’Equateur qui compte 17,5 millions d’habitants est le deuxième pays d’Amérique du Sud le plus touché par le Covid-19 et Guayaquil, sa capitale économique qui borde l’Océan Pacifique et qui est la plus peuplée du pays avec plus de 2,5 millions d’habitants, occupe la première place en termes de victimes de la pandémie puisqu’elle renfermerait 73% des 7.500 cas officiels.

Dès le début du mois de mars, le port de Guayaquil est apparu comme étant un point vulnérable. C’est là, en effet, qu’avait été détectée, chez une vieille femme revenue d’Espagne, la première infection au Covid-19 en Equateur. Pour rappel, quelques 500.000 équatoriens vivent et travaillent en Italie et en Espagne, les deux pays européens les plus touchés par la pandémie.

Or, bien que le flux des échanges entre Guayaquil, l’Europe et les Etats-Unis soit très intense dans la période février-mars qui est celle des vacances scolaires, les autorités équatoriennes n’ont pas réagi immédiatement aux dangers de contaminations venus de l’extérieur si bien que les conséquences ont été « dévastatrices » comme le soulignera un épidémiologiste de l’Université technologique équinoxiale de Quito.

«Nous voyons tomber nos morts en silence chaque jour (…) Ici ce n’est pas seulement le système sanitaire qui s’est effondré mais aussi les services funéraires et les morgues» s’exclame Cynthia Viteri la maire de Guayaquil ; cette ville qui, à elle seule, représente tout le spectre de ce que pourrait produire la diffusion de ce nouveau coronavirus dans les pays en voie de développement si l’épidémie n’est pas rapidement circonscrite.

Aussi, pour récupérer le nombre incalculable de dépouilles – 800 selon des chiffres officieux – qui gisaient parfois depuis trois semaines et sans même que soient précisées les causes de leur décès, après avoir été abandonnées dans leurs maisons ou dans la rue enveloppées dans du plastique noir dans l’attente de leur inhumation, la police et l’armée ont été appelées en renfort.

Un couvre-feu de quinze heures par jour, allant de 14 h à 5 h du matin, a été instauré dans l’ensemble du pays.

Après que les autorités de Quayaquil aient reconnu avoir délivré en mars 1.500 certificats de décès de plus qu’en février, le président Lenin Moreno qui a appelé, à la télévision, à un durcissement des mesures prises pour faire respecter le confinement et le couvre-feu a présenté une carte numérique faisant apparaître les secteurs traversées, selon lui, par des personnes contaminées et ordonné «l’utilisation de cet outil et la mise en place de mesures et de contrôles qui empêchent la libre circulation des porteurs du virus».

De son côté, le vice-président Otto Sonnenholzner qui a présenté ses excuses à la population, a reconnu que les images des corps gisant dans la rue ont nui à l’image du pays et annoncé qu’une unité spéciale a été crée afin de simplifier les procédures administratives et de permettre d’organiser des funérailles dignes au profit des personnes disparues même si cela ne peut se faire que dans des caisses en carton – les seuls disponibles pour le moment – en l’absence de cercueils en bois.

Autant dire que s’il ne fait pas bon mourir à Guayaquil, il ne fait pas bon y vivre non plus dès lors que le confinement a jeté dans la misère la plus noire les 70% de la population de la ville qui gagnaient, au jour le jour, de quoi nourrir leurs familles.

Enfin, si le 1er Avril, l’Etat avait commencé à verser des «bons de protection familiale» de 60 dollars mensuels à 400.000 foyers et qu’il vient d’étendre cette aide à 550.000 familles, celle-ci ne couvre, ni de près ni de loin, les besoins des intéressés, ne compense, en aucun cas, le manque à gagner dû au confinement et ne concerne pas, enfin, les 500.000 vénézuéliens qui vivent dans la rue sans aucune protection sociale. Jusqu’à quand durera ce calvaire ? Attendons pour voir….

Nabil El Bousaadi

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