La beauté du monde les questions de l’amour

Entretien avec Nabil Boudraa

Par Noureddine Mhakkak

Nabil Boudraa est Professeur des Universités à Oregon State University, aux États-Unis. Il y enseigne les études françaises et francophones. Il a publié plusieurs ouvrages en anglais et en français sur des sujets aussi divers que le cinéma, la littérature (principalement nord-africains), Albert Camus, l’oralité berbère, et la littérature américaine. Parmi ces publications:

 Algeria on Screen : Society, Culture and Politics in the Films of Merzak Allouache (2020), Francophone Cultures Through Film (2013), Hommage à Kateb Yacine (2006) et North African Mosaic: A Cultural Re-appraisal of Ethnic and Religious Minorities (2007).

Voici une interview avec lui. Bonne Lecture.

1-Que représentent les Arts et les Lettres pour vous ?

Les Lettres et les Arts représentent tout simplement la beauté du monde. C’est aussi un espace où on peut penser le monde, penser les questions existentielles de la vie et de la mort, l’amour, la foi, le rêve, etc. Je ne peux pas imaginer un monde sans littérature, sans arts, sans poésie.

2- Que représente l’écriture /La lecture   pour vous ?

L’écriture est un acte de découverte (pas seulement de soi mais du monde aussi), une tentative d’atteindre une vérité (si vérité il y a) ou du moins l’effleurer. L’écriture pour moi est aussi l’acte de s’ouvrir au monde et d’aller vers les autres. L’écriture est aussi une forme de partage, de générosité, d’échange, et d’épanouissement.

3- Parlez-nous des villes que vous avez visitées et qui ont laissé une remarquable trace dans votre parcours artistique.

Plusieurs villes m’ont marqué et chacune avec sa propre spécificité, mais je vais en citer que deux. D’abord, Tanger que j’ai visitée en 2000 (en provenance par bateau d’Algesiras). J’ai tout de suite remarqué cette ouverture de la ville sur la mer et sur elle-même, ce qui m’a instantanément donné un sentiment d’apaisement et de confort. Il n’y pas un meilleur espace pour un claustrophobe qu’une ville comme celle-ci. C’est une ville cosmopolite et qui n’a pas tourné le dos à la mer. Tanger semble être un espace d’accueil, de confluence, de ralliement. Cette visite m’a permis aussi de mieux comprendre mes lectures préalables de Paul Bowles et la Beat generation

4-Que représente la beauté pour vous ?

Pour moi, la beauté représente le degré le plus élevé de la perfection, c’est-à-dire, ce qui sort de l’ordinaire, le banal. La beauté est aussi ce qui contrecarre l’absurde, le nihilisme, et l’obscure.

5- Parlez-nous des livres /films que vous avez déjà lus/vus, et qui ont marqué vos pensées.

Pour moi, Nedjma de Kateb Yacine non seulement symbolise l’Algérie mais sert de texte fondateur de la nation algérienne. C’est un texte fondamental de la littérature algérienne en langue française, et nord-africaine en général.

Récemment, j’ai lu Les désorientés d’Amin Malouf qui m’a tout aussi bouleversé. L’histoire concerne le Liban des années 70 et 80, mais ça traite aussi de plusieurs sujets d’actualité comme l’identité, l’immigration, la religion, le désenchantement en politique, etc.

 En ce qui concerne le cinéma, je trouve le cinéma de Merzak Allouache intéressant car il touche aux vrais problèmes de la société, notamment ceux des classes défavorisées. Son film, Les terraces (2013), par exemple, est un chef d’œuvre. Il traite de plusieurs thèmes en même temps, mais toujours avec un fil conducteur qui est celui du sort de la société algérienne. Dans le même sillage, je trouve le film Razzia de Nabil Ayouch tout aussi intéressant. En plus de sa grande qualité au niveau cinématographique, ce film aborde lui aussi les grandes questions qui concernent la société marocaine contemporaine.

Enfin, j’admire aussi le cinéma de Youssef Chahine (Le destin, en particulier) car il nous donne une perspective dans la durée.  Il nous permet de comprendre que certains phénomènes ne datent pas d’aujourd’hui, mais ont leur source dans l’histoire lointaine, à savoir l’intolérance, le fanatisme islamiste, etc.

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