En Iran, on pend encore les opposants…

Attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

Le régime des mollahs continue de fouler aux pieds les droits humains de la manière la plus vile et la plus abjecte qui soit et ne s’en cache point. La preuve, ce samedi, après son enlèvement et un procès expéditif, Rouhollah Zam, un journaliste de 41 ans, en exil en France depuis 2012,  a été « pendu haut et court » au vu et au su de la communauté internationale comme s’il s’agissait d’un banal fait divers.

Mais que lui reprochaient donc les autorités de Téhéran ?  

Propriétaire d’une station de télévision privée « Amadnews », suivie par quelques 1,4 millions d’abonnés, ce dernier n’aurait eu de cesse de diffuser les images des manifestations anti-régime de l’hiver 2017-2018 et, en s’appuyant sur des informateurs haut placés, de mettre à nu de nombreuses affaires de corruption mettant en cause plusieurs dirigeants iraniens.

Autant de raisons pour lesquelles les services de sécurité de l’Hexagone qui le protégeaient, lui avaient formellement interdit de se rendre en Irak en 2019. Mais l’alléchante aide financière que de prétendus opposants iraniens s’étaient dits prêts à lui accorder pour lui permettre de réaliser son projet de chaîne de télévision prit le dessus. Ayant fait la sourde-oreille aux mises en garde des services secrets français, dès son arrivée sur le territoire irakien où l’attendaient, de pied ferme, les « gardiens de la révolution iranienne »,  Rouhollah Zam a été arrêté puis ramené dans son pays où les « aveux publics » qu’il a fait sur les ondes

de la télévision nationale l’ont rendu coupable de « délits contre la sécurité du pays », d’« espionnage » au profit de la France et d’« insulte au caractère sacré de l’Islam ».

Mais cet enlèvement et cette exécution «barbare» et «inacceptable» aux yeux de la diplomatie française ne sont pas un cas isolé puisqu’en Octobre dernier, Habib Chaab, un autre dissident iranien réfugié en Suède, avait été attiré par une femme à Istanbul puis enlevé par un trafiquant de drogue travaillant pour les services secrets de la république islamique en Turquie.

Et si, enfin, l’exécution de Rouhollah Zam peut apparaître comme étant un avertissement donné à la France qui soutient ouvertement le président Hassan Rohani, l’absence de toute réaction de la part de ce dernier, officiellement partisan d’un rapprochement avec l’Occident, est non seulement une preuve irréfutable de l’affaiblissement de l’aile modérée du régime iranien mais également celle de sa  militarisation croissante à la veille des élections présidentielles de Juin 2021 auxquelles l’actuel président ne pourra pas prendre part après son second mandat alors même que c’est sur la frange modérée du régime de Téhéran que reposaient tous les espoirs concernant une reprise du dialogue américano-iranien et, surtout, une réactivation de l’accord de Vienne tel que l’avait souhaité Joe Biden pendant sa campagne électorale.

Considérant, enfin, que la complexité du régime iranien réside dans le fait que la réalité du pouvoir qui échappe au président élu est détenue par un Guide suprême omnipotent et par des « Gardiens de la révolution » non contrôlés par le chef de l’Etat, toute analyse politique demeurera incertaine. De quoi donc demain sera-t-il fait dans ce pays qui, après avoir pratiqué pendant longtemps une certaine forme de retenue, serait en train de s’en départir au risque d’inquiéter tous ceux qui, au sein de la société iranienne meurtrie par la crise économique à laquelle est venue s’ajouter la crise sanitaire mondiale du Covid-19, craignent de voir leur pays sombrer dans une dérive qui pourrait faire de lui un nouvel  « Etat voyou » ? Attendons pour voir…

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