L’identité culturelle et les arts

Par Mohammed Serraji

L’art est une activité créatrice. C’est le moyen par lequel l’être humain se détache de la nature. Contrairement à la technique, son produit n’a pas comme finalité d’être utile, il est destiné à la contemplation plutôt qu’à l’action. L’art est lié à la question du beau et à son universalité. C’est par lequel on obtient  un résultat (par l’effet d’aptitudes naturelles).  Aussi, il est un ensemble de connaissances et de règles d’action, dans un domaine particulier. L’art regroupe les œuvres humaines destinées à toucher les sens et les émotions du public. Il peut s’agir aussi bien de peinture que de sculpture, vidéo, photo, dessin, littérature, musique, danse…

L’œuvre d’art est un objet qui doit servir de support à la pensée, à la réflexion. L’art permet de réfléchir et de comprendre la société dans laquelle on vit. Par là même, il permet d’être plus libre, d’avoir plus de capacités à choisir, de développer un esprit critique. C’est pleinement un support d’éducation citoyenne.

Un aperçu sur l’expérience picturale du Maroc

On parle souvent d’une peinture de signe. En effet, le plus souvent issus de l’iconographie pictogramme, les signes constituent répertoire multiforme d’une mémoire ancienne et sombre. C’est pourquoi les lettres tifinaghs se trouvent considérablement dans certains travaux qui sont répertoriés en peinture du signe. Celle pratiquée au Maroc renvoie à une culture plusieurs fois millénaires.

La peinture marocaine d’inspiration culturelle cas de Cherkaoui dont l’un de ses aïeux, Mohamed Cherki, est un soufi célèbre, et par sa mère, qui meurt alors qu’il est encore jeune, d’un village amazigh du Moyen Atlas,

« Enfant, ces signes l’intriguaient chez sa mère qui les portait sous forme de tatouages au visage et sur les mains. Il a fait des recherches à travers l’Atlas et dans différentes régions du Maroc (…). Il les admirés sur les poteries anciennes, les bijoux, les tapis, les cuirs des régions sahariennes (…)». Mohamed Sijelmassi La peinture marocaine, Paris, éditions Jean-Pierre Taillandier, 1972, p. 62.

Lorsqu’on parle de la peinture marocaine, il est très utile de mettre en exergue la singularité de cette dernière par rapport à l’expérience de l’Europe et en particulier sa partie méditerranéenne. L’entrée du chevalet au Maroc : Mohamed Ben Ali Rbati : Il est admis que le premier peintre de chevalet marocain qui s’est appliqué à l’exercice est Mohamed Ben Ali Rbati (1861-1939). Natif de Rabat, il vint à Tanger avec sa famille tout jeune, à la fin du XIXe siècle comme artisan menuisier. Nous souhaiterons traiter l’activité picturale marocaine avant cette période, celle de l’entrée du chevalet au Maroc.

L’art rupestre dès la préhistoire :

Dès la Préhistoire, la terre qui est aujourd’hui le Maroc était habitée par des populations amazighs un peuplement facilité par le climat très favorable. Grâce aux recherches scientifiques et archéologiques, il a été établi que les premières activités humaines dans la région datent d’au moins 700 000 ans. Au Maroc, ont notamment été retrouvés des ossements, des outils ainsi que des vases et des bijoux datant de la Préhistoire. Le Maroc compte justement de nombreux sites archéologiques préhistoriques. Aux carrières Thomas, à 8km au sud-ouest de Casablanca, une mandibule d’Homo-Erectus a été trouvée. A la carrière de Sidi Abderrahmane, des fouilles ont permis la découverte d’outils en pierre taillée et d’une faune fossile très variée. Jbel Irhoud, entre Safi et Marrakech, est le site où deux crânes d’Hominidés ont été sortis de terre. A 30km au sud de Rabat, se trouve le site de Rouazi Skhirat : une nécropole du Néolithique (environ 3800 av. J.C.), où de nombreux vases en céramique, des gobelets, des bracelets en ivoire ainsi que des restes humains ont été retrouvés. Et la liste est loin d’être finie. La grotte de Kaf Taht El Ghar, la grotte de Taforalt, la grotte de Dar Soltane, mais aussi les peintures rupestres de l’Atlas et des régions présahariennes et sahariennes font du Maroc une région majeure de la Préhistoire.)

Les gravures rupestres d’AïtOuazik sont des gravures préhistoriques du Mésolithique, apparentées à celles du sud oranais (Algérie). On les date d’environ 10 000 ans. Le site est un ancien lit de rivière, d’où le nom des Gorges Aït Ouaazik, et un ancien lac asséché, gagné par le désert du Sahara. Aït Ouaazik se trouve à 70 km de route au nord de Zagora.

L’identité et l’art rupestre :

Depuis la nuit des temps, les interrogations sur l’identité ont toujours été présentes. Cependant, elle semble trouver son paroxysme depuis la célèbre phrase de Socrate, « Homme, connais-toi toi-même ». Ainsi a-t-elle saisi l’attention de nombreux penseurs issus des divers champs de recherche scientifique.

En effet, l’homme s’est toujours posé tant de questions sur sa propre identité, sur sa propre nature, sur son origine et sur sa destinée. Une quête à la recherche de soi et en vue de savoir réellement qui il est.

Les experts ont utilisé des notions théoriques provenant de l’archéologie, de l’anthropologie, de l’histoire de l’art, des études autochtones, de l’analyse de la propriété intellectuelle et des études sur le patrimoine visuel. Ils ont cherché à comprendre ce que l’art rupestre signifie pour les populations contemporaines, comment les gens l’utilisent aujourd’hui, et comment ces compréhensions et utilisations varient d’une nation postcoloniale à l’autre. Ils ont déterminé qu’une gestion appropriée des sites rupestres fragiles dans les parcs nationaux et d’État peut changer les choses, car elle remet en question les idées préconçues sur l’art rupestre et les populations.

L’analyse de données ethnographiques et archéologiques a produit des résultats probants et des suggestions pratiques concernant la formation de l’identité et la présentation de l’art rupestre autochtone. Ces résultats sont applicables aux sites d’art rupestre publics du monde entier. L’écriture libyque est utilisée pour noter la langue du même nom – déjà mentionnée par Hérodote (IV, 155)  et, après plus de deux millénaires, sa descendante actuelle, appelée tifinagh, sert toujours aux Touaregs, avec quelques variantes, pour noter leur langue26. Rappelons que le terme « libyque » désigne ici le nord de l’Afrique, selon l’usage ancien, et que les textes libyques de Numidie (actuelles Tunisie septentrionale et Algérie  orientale) sont généralement contemporains de l’Antiquité carthaginoise et romaine. L’écrasante majorité des inscriptions libyques, formulaires et répétitives, se trouvent sur des stèles funéraires (fig. 1), où elles sont parfois accompagnées de textes puniques ou latins, tandis que les inscriptions tifinagh (fig. 2) sont très généralement gravées ou peintes sur les rochers du Sahara central et centro-méridional.

L’aire de répartition de ces graphies (en gros, des Canaries à la Libye, et de la Méditerranée au Sahel) recouvre celle des parlers berbères actuels ou disparus, qu’elles ont servi ou servent encore à transcrire. Les lettres utilisées sont construites à partir du point, du trait, du cercle et du carré, leur tracé est non cursif, et elles sont disposées en lignes verticales de bas en haut pour les textes libyques, verticales ou horizontales pour les textes en tifinagh.

La peinture amazighe :

Depuis la deuxième moitié du XIX ème, les pays nord africains (pays du Maghreb), après les décolonisations de ces derniers, cette aire géographique a connu un grand rebondissement culturel amazigh qui revendiquait essentiellement des droits culturels légitimes.

Cette période a vu la naissance de plusieurs associations culturelles qui ont pu et grâce à eux que le patrimoine artistique et culturel de ces pays a résisté à des politiques d’effacement identitaire. C’est pourquoi nous parlons de peinture «  amazighe » cet adjectif qui a donné cette particularité aux arts plastiques du Maghreb en général et en particulier au Maroc où ceux-ci ont perpétré des expressions artistiques les plus anciennes ; le graphisme et la gravure que l’Homme nord africain a exploré depuis le néolitique. Parallèlement au dessin réaliste, l’Homme préhistorique a très tôt découvert l’art abstrait et le symbolisme. Les artistes de ces temps ont exploré un vaste répertoire de symboles, de signe et de motifs qui ont peint, gravé et tatoué.

Cette expression artistique, transmise de génération en génération, a certainement subi, au fil du temps, plusieurs évolutions et d’influences d’autres cultures. Elle a été réalisée sur différents supports et selon divers techniques. L’art de graphisme a toujours accompagné l’activité humaine sur tout le territoire nord africain. Nos aïeux amazighs nous ont légué le témoignage infaillible de leurs activités artistiques.

La genèse des arts plastiques au Maroc ne date donc pas des années cinquante, comme le prétendent certains critiques d’art, et n’est pas tributaire de l’avènement de la colonisation, bien au contraire, c’est une pratique ancestrale enracinée et gravée dans le patrimoine culturel plusieurs fois millénaires des marocains.

Qu’est-ce que l’art sinon un acte de partage et donc de générosité ?

L’acte de création n’est autre que l’accomplissement par l’artiste de ses pensées intimes. Celles-ci sont partagées avec le publique.

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