Une invitation à réfléchir sur la complexité de la réalité

« Reg’Art Surréel » d’Idries Karnachi

Par Omar Er-rouch – MAP

À travers une série de collages engagés, d’anamorphoses photographiques et d’objets usuels détournés, l’artiste Idries Karnachi offre une profonde réflexion sur la complexité de la réalité dans son exposition « Reg’Art Surréel », dont le vernissage a eu lieu, samedi soir à Marrakech.

Pour sa première exposition solo, Karnachi, architecte-urbaniste de formation et artiste visuel de transformation, encourage le spectateur à s’interroger sur la façon dont la réalité peut être si complexe, où des observations tout aussi valables mais provenant de perspectives différentes, peuvent sembler contradictoires.
Ses « photocollages », qui conjuguent des éléments photographiques issus d’ici et d’ailleurs, recomposent des personnages, des expressions et des situations de la culture marocaine populaire pour donner naissance à des mélanges visuels hors du commun qui s’échappent par absurdité logique et dépendent de la vision du monde de chacun.

« J’imagine des scènes surréalistes en combinant des objets, des personnes ou des situations du quotidien avec une imagerie emprunte de poésie ou d’humeur par moment engagé, inventive ou tout simplement plaisante », explique le jeune artiste dans une déclaration à M24, la chaîne télévisée d’information en continu de la MAP, faisant savoir que ses collages sont des narrations visuelles laissant au spectateur la libre interprétation de ce qu’il voit.
Tout au long de cette exposition, logée dans un espace censé accueillir une série d’expositions et nombre d’échanges culturels, le visiteur découvre la « vérité Karnachi » : tout ce que l’on peut entendre n’est pas nécessairement un fait, mais plutôt une opinion, et tout ce que l’on voit n’est pas nécessairement la vérité, mais plutôt un point de vue.
« A travers mon travail, j’essaie de montrer qu’il existe plusieurs vérités. Ça dépend de notre perspective, de notre point de vue… Une personne n’a pas forcément raison ou tort, mais ça dépend plutôt du point de vue dans lequel elle se place », renchérit Karnachi, dont les œuvres proviennent de sources variées et constituent l’étagement de deux époques alliant tradition et modernité.

Cet architecte et urbaniste, qui avait fait une expérience professionnelle chez David Chipperfield et Studio KO, agences d’architectures à la notoriété internationale, avant de décider de voler de ses propres ailes en lançant son propre studio alliant art et architecture entre Paris, Marrakech et Genève, voit dans l’art du collage un outil particulièrement adéquat pour représenter sa vision du monde, un melting-pot culturel non figé dans un espace-temps où tout est possible. Il est question ici d’abolir les frontières de la réalité, de découvrir de nouvelles perspectives, de montrer que plusieurs vérités peuvent coexister, et cela afin d’explorer tous les états de la conscience pour libérer l’esprit et le décloisonner.
Cette multiplicité de perspectives est provoquée par une mobilité permanente depuis son enfance. Né à Casablanca en 1993, Karnachi a déjà vécu dans une grande partie du globe, où il a su tirer profit d’une éducation culturelle très ouverte sur le monde pour élargir ses horizons et enrichir sa créativité.

« J’ai grandi au Maroc, mais j’ai poursuivi mes études d’architecture et d’urbanisme à Paris puis à Shanghai. La rencontre avec d’autres cultures te remet en question en tant que personne en te permettant de découvrir leur propre vérité, leur façon de faire en fonction de leur contexte, de leur climat, de leur histoire… », indique le jeune artiste, qui tente de « décloisonner les esprits », d’ »ouvrir les esprits » et de « se libérer de la bulle qui nous empêche d’avancer ».
Pour cela et depuis son retour au Maroc, Karnachi utilise cette culture de la diversité dans sa pratique créative qu’il résume dans une phrase : « Quand l’Art de combiner les mots pour évoquer des images rencontre celui de combiner des images pour évoquer des mots ».

Son école ? Karnachi temporise avant de se lancer. « Mon travail se situe entre le pop art et le surréalisme avec un soupçon de dadaïsme. Je suis un adepte d’un art qui se veut populaire qui parle à tout le monde, qui défend l’existence de plusieurs vérités et qui par moments appelle à une remise en question des faits arbitrairement établis ».
« Reg’Art Surréel » s’inscrit dans le cadre du projet « 24/7 Open-Minded », une série d’expositions d’art ayant pour but de lancer un nouvel espace complétement dédié à l’art et à la culture, qui suit les traces de Dar Al-Mamou, une organisation à but non-lucratif reconnue par l’UNESCO.
Au-delà de l’exposition d’art, cette première édition marque le renouveau d’un projet ayant pour but de soutenir le développement des artistes locaux à long terme, promouvant l’identité culturelle marocaine et africaine.

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