L’Inde veut donner un coup d’arrêt à ses exportations de blé

Attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

Deuxième pays plus grand producteur de blé au monde mais soucieux d’assurer sa « sécurité alimentaire » après un déclin de sa récolte du fait d’une chaleur extrême mais, surtout, de l’offensive militaire russe lancée le 24 février sur l’Ukraine qui a compliqué l’approvisionnement sur le marché mondial car cette dernière, qui était le quatrième exportateur mondial de maïs et en passe de devenir le troisième exportateur de blé, a été happée par la guerre,  l’Inde a interdit, à partir de ce samedi, toute exportation de céréales sauf autorisation spéciale du gouvernement.

L’Inde ayant donc décidé de garder son blé pour sa consommation intérieure tout en se réservant le droit de n’en vendre qu’aux pays qui, à ses yeux, seraient réellement dans le besoin, les ministres des Affaires étrangères des pays du G7 (Allemagne, France, Italie, Canada, Etats-Unis, Japon et Royaume-Uni), rejoints par leurs homologues ukrainien et moldave, se sont rencontrés ce samedi à Stuttgart en Allemagne pour convenir des mesures qu’il conviendrait de prendre, d’abord pour contraindre l’Inde à revenir sur sa décision puis pour veiller à « alimenter » le marché pour contrer l’insécurité alimentaire.

A l’issue de cette rencontre, le ministre allemand de l’Agriculture a déclaré, lors d’une conférence de presse qu’il a tenue conjointement avec son homologue ukrainien, que, pour contourner le blocus imposé par la Russie aux ports ukrainiens pour pouvoir « sauver le plus possible les récoltes », il a été décidé d’utiliser les voies terrestres, ferroviaires ou fluviales, via le Danube, pour faire sortir du pays avant la prochaine récolte les quelques 20 millions de tonnes de céréales entreposés dans les silos ukrainiens. 

Considérant que l’insécurité alimentaire et la hausse des prix des denrées sont une conséquence de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le chancelier allemand Olaf Scholz a rappelé à Vladimir Poutine, lors d’un entretien téléphonique, la « responsabilité particulière » de la Russie dans l’approvisionnement alimentaire mondial « particulièrement sous tension en raison de la guerre ».

En annonçant, par ailleurs, que la Commission européenne a présenté un plan pour aider l’Ukraine à exporter sa production en mobilisant des capacités de fret, le dirigeant allemand a tenu à préciser qu’il va falloir œuvrer pour « débloquer les ports de la Mer noire et établir des liens logistiques avec les ports baltes ».

Mais bien que les exportations de blé indien soient, désormais, subordonnées à la délivrance, par le gouvernement de New Delhi, d’une autorisation spéciale et que cette disposition n’est applicable qu’aux exportations futures puisque les contrats conclus antérieurement vont être honorés, la décision prise par l’Inde va, sans conteste, compliquer davantage l’approvisionnement du marché mondial et aggraver la situation des pays africains très dépendants des exportations de céréales ou d’engrais russes et ukrainiens qui sont déjà victimes d’une profonde insécurité alimentaire du fait des conflits, des crises climatiques et des chocs économiques.

Aussi, en déplorant la décision prise par New Delhi et le fait que « si tout le monde commence à imposer de telles restrictions à l’exportation ou même à fermer les marchés, cela ne fera qu’aggraver la crise et nuira, également, à l’Inde et à ses agriculteurs », le ministre allemand de l’Agriculture, Cem Özdemir, a appelé le gouvernement indien « à prendre ses responsabilités en tant que membre du G20 » du moment que ce dernier s’est déjà prononcé « contre les restrictions d’exportation » et qu’il a demandé « à maintenir les marchés ouverts ».

Tout cela va-t-il pousser Moscou et New Delhi à assouplir leur position de manière à alléger la crise alimentaire mondiale qui se profile à l’horizon ?

Rien, pour l’heure, ne va dans ce sens mais attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

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