Comment fabriquer les champions?

La Fondation Attijariwafa bank a organisé le jeudi 06 avril une conférence sous le thème : «Le Sport au Maroc : comment redémarrer la machine à fabriquer des champions ?». Cette rencontre rentre dans le cadre du programme du cycle de conférences de la Fondation AWB.

Dans une atmosphère chaleureuse, plusieurs personnalités connues du paysage sportif marocain se sont réunies pour converser d’un thème des plus importants : «Le Sport au Maroc : comment redémarrer la machine à fabriquer des champions ?».

Après un premier mot de bienvenue, mais aussi en guise d’introduction au thème en question, le Président Directeur Général du Groupe Attijariwafa bank, M. Mohamed El Kettani, a pris la parole pour rappeler l’intérêt que porte un tel sujet, non seulement pour la communauté sportive mais pour le Maroc.

Après quoi, le sifflet du débutde cette conférence fut donné par M. Bouimid Belaid, ex-président de l’Union Africaine des Journalistes Sportifs. En tant que modérateur, M. Belaid a géré les interventions d’une salle qui regorgeait de champions de différentes disciplines (Foot, Athlétisme, Tennis, Basket, Boxe, Volley…). Nawal El Moutawakel, Brahim Boulami, Merry Krimau comme d’autres grandes stars de leurs temps et d’aujourd’hui, ont répondu présent.Une audience qui s’est plu à écouter trois intervenants de taille à savoir, M. Nasser Larguet, Directeur Technique National de la FRMF, M. Aziz Daouda, Directeur Technique de la Confédération Africaine d’Athlétisme, M. Rachid M’Rabet, Professeur, Directeur de l’Ecole Doctorale, Groupe ISCAE.

Durant leurs intervenions respectives, chacun des intervenants a mis le doigt sur un aspect particulier de la chaîne du sport. Pour M. M’rabet, il s’agissait de mettre en exergue l’aspect de l’utilité de la formation pour le secteur du sport. Dans ce sens, le Directeur de l’ISCAE, après avoir présenté le Master spécialisé en Management du Sport proposé par l’Ecole, a fait savoir la nécessité du management pour mieux cerner les rouages du champ sportif marocain. «Dans le contexte actuel, la formation est un élément indispensable pour mener à bien le projet de fabrication des champions».Et parce que le besoin se fait -de plus en plus- sentir, l’école a même facilité l’accès à cette formation aux sportifs « de haut niveau » et ce, sans être conditionnés par l’obtention d’une Licence. D’ailleurs, M. M’rabet n’a pas manqué d’évoquer les noms de quelques grands champions, lauréats de l’ISCAE.

Le directeur de l’école doctorale de l’ISCAE s’est également penché sur l’importance de l’«accompagnement» au niveau des écoles pour favoriser le développement de l’éducation sportive. En plus de la nécessité de la mise en placed’une «veille stratégique» pour un suivi permanent à travers des centres de veille pourvoyeur de mener à bien cette démarche.

Dans la même trame, mais sous un autre angle cette fois-ci, l’exposé de M. Aziz Daouda fut aussi riche par son appréhension globale de la problématique liée à la fabrication des champions. Pour lui, le manque des exploits veut tout d’abord et avant tout à redéfinir le sport. Dans ce sens, il a poussé à réfléchir sur le côté spectaculaire et de divertissement de toute activité sportive. Un spectacle qui a impérativement besoin d’instaurer un processus réel de détection, un prodige étant difficilement repérable quel que soit l’échantillon soumis au repérage. «Il faut aller provoquer le talent», a-t-ildéclaré ; affirmant qu’«il faut associer le sport à la performance».

Il s’est également agi lors de son intervention à M. Daouda de sensibiliser à l’importance du sport de masse pour bâtir le sport d’élite. «Le sport d’élite est tributaire du sport de masse», explique-t-il.Daouda ne s’est pas empêché d’appeler à «revoir la Loi du Sport et la conférer à des spécialistes».

M. Nasser Larguet, de son côté, confirme les propos des deux autres intervenants. Il consent à ce que la détection comme la formation soient toutes deux nécessaires pour ressusciter les exploits d’autrefois. En football, M. Larguet a fièrement cité deux noms qui ont, après avoir achevé le parcours de six années à l’Académie Mohammed VI de Football, figurent maintenant parmi les Lions, en parlant de Mendyl et En-Nesyri. Il a ensuite présenté quelques projets que la FRMF cherche à concrétiser pour faire valoir le football marocain, notamment celui de la mise en place de Centres fédéraux qui prendront en charge 80 garçons et 20 filles (12 ans-18 ans) et ce, dans quatre villes à savoir, Saïdia, Larache, Ifrane et Agadir.

Dans le même ordre d’idées, Larguet a fait savoir l’engagement de la Fédération avec l’Office de la Formation Professionnelle et de la Promotion du Travail (OFPPT) et le Centre de l’économie et du Sport (CDES). Cet engagement a pour ambition de former des «Stadium managers» et des «Football managers» pour pallier le manque de véritable techniciens et formateur dans le domaine.

Par ailleurs, l’espace au débat – tendu et très constructive – a été bel et bien, et comme prévu, au rendez-vous. Journalistes,professeurs universitaires spécialistes du Sport, sportifs de haut niveau, étudiants en management du Sport, tous ont eu le droit d’échanger pour confirmer ou infirmer certaines positions, partager les opinions sur les perspectives envisagées, ou encore, pour certains chercheurs en la matière, proposer des projets pour restructurer le paysage sportif marocain.

Lors d’un entretien accordé à Al Bayane sur les raisons de cette disparition des champions et par conséquent des exploits, notamment en athlétisme, Madame Nawal El Moutawakel a vu en cette réalité une aberration parce qu’en dépit des moyens déployés, les résultats ne suivent pas et le palmarès est pauvre depuis bel et bien des années. Et d’ajouter : «Je pense qu’il est impératif de prendre en considération et de manière plus sérieuse les directives de SM le roi Mohammed VI pour que les exploits reviennent».

Ce que l’on peut donc retenir des différentes interventions, c’est que le champ sportif marocain est victime du manque de professionnalisme de certains dirigeants, d’un déficit énorme au niveau des compétences managériales en sport, d’une marginalisation du sport de masse, d’infrastructures quasi-inexistantes pour favoriser le sport de masse duquel éclot, grâce à la détection, le sport d’élite. Victime d’une inconscience collective !

Pourvu que les parties concernées veillent à concrétiser le théorique afin d’offrir au Maroc d’une part, les fruits de ce qu’est devenu aujourd’hui une grande industrie. Et d’autre part, redessiner le sourire sur le visage d’une nationoù la jeunesse peine à faire valoir ses capacités sportives pour des raisons liées à tant de pratiques archaïques et antidémocratiques. Il est temps de ressusciter les exploits d’autrefois, dans un pays qui boite gravement en matière de Sport. Ainsi, on aura joint l’industrie au plaisir ; l’utile à l’agréable.

Ahmed Mesk

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