Running on empty

Un bloc historique et populaire pour relancer le processus démocratique

Le communiqué du Bureau politique du PPS publié à l’occasion de la commémoration de l’anniversaire du 20 août a suscité un vif intérêt auprès de l’opinion publique. Dans un été caniculaire, désastreux en termes d’images et de désenchantement, l’appel du PPS pour relancer le processus démocratique à partir des valeurs du 20 août est ainsi apparu comme une lueur d’espoir en plein naufrage; un faisceau de lumière dans la nuit entretenu par les discours déclinistes et nihilistes; un cri pour rompre le silence absurde qui alimente désespoir et différentes formes de replis…

Cela n’est pas fortuit ; nous sommes en présence d’un geste politique pensé et raisonné fruit d’une grande maturité politique. L’appel du 20 août s’inscrit dans la droite ligne d’un discours et d’une pratique forgés dans la lutte sur le double front de l’émancipation des citoyens et de la souveraineté du pays. Sur cette voie, le PPS a, durant sa riche histoire, payé un lourd tribut pour développer, concrétiser, préserver une ligne politique indépendante dictée uniquement par le souci de servir la cause «du peuple et de la nation», selon le mot d’ordre forgé par son leader historique, Ali Yata dont le parti vient de commémorer le vingtième anniversaire de sa tragique disparition.

Dans les moments les plus difficiles et dans les conditions politiques les plus variées y compris quand le parti était empêché de son droit à l’action politique légale où quand il était la cible des manœuvres déclarées et occultes pour nuire à son image, sa voix a toujours retenti dans la clarté et la transparence pour tirer la sonnette d’alarme. Non pas pour un bénéfice politicien étroit ou par le biais d’un populisme facile mais en usant d’un argumentaire  rationnel prenant en compte les différents aspects de la problématique abordée. Son appel à relancer la dynamique démocratique a accueilli des avis favorables et positifs justement parce que les observateurs les plus objectifs se sont retrouvés dans son analyse lucide aux antipodes de la tendance démagogique ambiante.

Mais l’image qui a retenu le plus attention, et c’est elle qui a certaine suscité la séduction née du communiqué du BP, c’est le recours à la figure « du second souffle ». Une image à forte charge politique et symbolique. Elle a également une dimension culturelle ; le cinéma par exemple, a beaucoup eu recours à l’image du «souffle». Les cinéphiles – mais pas seulement- connaissent deux grands films dans ce sens A bout de souffle de Godard et Le deuxième souffle de Melville.

Il se trouve effectivement que le système politique donne des signes d’essoufflement. Les formules adoptées étant biaisés dès le départ ont très vite montré leur limite. Il est temps de « renouveler le souffle démocratique » pour éviter au pays les scénarii catastrophiques que lui prédisent ses détracteurs. Certes, il n’y a pas de recette miracle ni de baguette magique, mais il y a des pistes à suivre et surtout des volontés à mettre en action. Et des expériences à relire à la lumières des défis présents. Un symbole fort a été mis en avant par le PPS, celui de puiser dans la boîte à outils formant le patrimoine commun du mouvement national et de la monarchie. Celle- là même où ils ont puisé l’énergie nécessaire pour affronter des épreuves historiques qui ont forgé le Maroc contemporain. Au cœur de cette démarche, le débat est ouvert pour les meilleures voies à suivre.

Pour ma part je plaide en faveur  de la réhabilitation de l’idée d’un bloc historique et populaire pour relancer  la dynamique démocratique et empêcher le système d’être à bout de souffle ou à bout de course comme le suggère très bien le titre du film américain Running on empty (Sydney Lumet, 1988). L’idée de bloc historique (une variante gramscienne du compromis historique) qui a nourri la position du parti et brillamment mise en application en 2011, l’année de tous les espoirs. Espoirs que les calculs et les intérêts égoïstes des uns et des autres ont transformé en cauchemar. Un cauchemar qui a assez duré.

Mohammed Bakrim

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