Cancer du sein: un problème de santé majeur

Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme. On estime qu’une femme sur 8 risque de développer un cancer su sein  au cours de sa vie, ce qui en fait un problème majeur de santé publique. Avec  près de 12. 000 nouveaux cas identifiés chaque année au Maroc, le cancer du sein  reste le plus fréquent des cancers féminins. Fort heureusement, le taux de guérison de ce cancer est aujourd’hui de l’ordre de 90%, grâce aux progrès de la médecine, aux campagnes systématiques de dépistage qui sont réalisées chaque année au Maroc à l’occasion d’Octobre Rose et qui permettent de  poser un diagnostic précoce du cancer du sein et de sauver des milliers de femmes.

Le cancer du sein chez la femme est vécu comme une malédiction, car il touche à la féminité même, et bien souvent on assiste à un grand désespoir qui marque les visages car la prise en charge peut être lourde et pénible, au regard des séances de chimiothérapie  et de radiothérapie, sans oublier le traitement chirurgical qui consiste à enlever totalement le sein malade. Ce sont des expériences souvent traumatisantes qui restent à jamais présentes dans l’esprit de bien des femmes. On comprend dès lors toute l’importance d’un dépistage précoce dans ce type de cancer, comme pour toutes les autres pathologies cancéreuses.

A l’instar des autres pays de la planète, le Maroc organise chaque année des campagnes de dépistage du cancer du sein sur l’ensemble du territoire national de Tanger à Lagouira.

C’est ainsi que le mois d’octobre (Octobre Rose) est devenu au fil des ans celui d’une mobilisation nationale contre ce fléau qui représente un réel problème de santé publique.

Cette année, la campagne de sensibilisation au dépistage du cancer du sein 2017 a débuté le 20 octobre  et se poursuivra jusqu’au 12 novembre.

Pour l’édition de 2017, les organisateurs ambitionnent de permettre à un million de femmes âgées de 40 à 69 ans de se faire dépister. Détecté  à un stade précoce, le cancer du sein a pratiquement toutes les chances de guérir. Le dépistage consiste à avoir un contrôle médical régulier, avec des examens cliniques réguliers et à partir de 40 ans.

Professeur Aghzadi Rajaa, spécialiste de la chirurgie du sein

«Après un cancer, la vie continue»

Pour en savoir plus sur le cancer du sein, Al Bayane est allé à la rencontre du professeur Aghzadi Rajaa, chirurgienne spécialiste de la chirurgie du sein et présidente de l’association Marocaine de lutte contre le cancer du sein.

Al Bayane : Qu’est ce que le cancer du sein?

Professeur Aghzadi Rajaa : Pour faire simple,  nous dirons tout d’abord que le cancer est une multiplication, une prolifération anarchique et incontrôlée de cellules anormales qui entraine la formation d’une masse ou tumeur. En ce qui concerne le cancer du sein qui représente près de 25%, il faut distinguer entre deux catégories: les cancers non invasifs et les cancers invasifs. Dans le cas des cancers non invasifs,  les cellules cancéreuses restent confinées dans les canaux ou les lobules.

Les cancers invasifs ou infiltrant représentent  75% des cas. Dans ce type de cancer, les cellules cancéreuses envahissent les tissus entourant la tumeur et peuvent se propager vers d’autres parties du corps. On les appelle alors des métastases.

Quels sont les symptômes?

Différentes anomalies peuvent alerter. Elles peuvent être repérables par la femme elle-même ou lors d’un examen médical. Dans tous les cas de figure,  les signes qui doivent alerter sont une boule ou une masse dans un sein. Cette masse, en général non douloureuse, est le plus souvent de consistance dure et présente des contours irréguliers. Elle apparait par ailleurs comme fixée dans le sein. On peut aussi noter l’apparition de ganglions durs au niveau de l’aisselle. En effet, une ou plusieurs masses dures à l’aisselle signifient parfois qu’un cancer du sein s’est propagé aux ganglions axillaires. Les ganglions restent toutefois indolores. Il faut aussi noter des modifications de la peau du sein et du mamelon. La peau du sein peut devenir capitonnée (et prendre l’aspect d’une peau d’orange) ou plissée. Le mamelon peut pointer vers l’intérieur, alors qu’habituellement, il est dirige vers l’extérieur. Le sein peut se déformer et perdre de son galbe, des rides peuvent apparaitre. La peau du sein peut être rouge, écorchée (ulcérée), recouverte de croûtes et celle du mamelon peut se mettre à peler. Un écoulement d’un seul mamelon peut être le signe de cancer du sein, en particulier s’il se manifeste sans qu’il n’y ait de compression du mamelon et s’il contient du sang ou s’il est verdâtre.

On peut noter aussi un changement de la taille ou de la forme du sein. La tumeur peut grossir et se propager vers d’autres parties du corps, entrainant ainsi d’autres symptômes dits plus tardifs, tels que des douleurs osseuses, des nausées, une perte d’appétit, une perte de poids et une jaunisse, un essoufflement, une toux et une accumulation de liquide autour des poumons (épanchement pleural), des maux de tête, une vision double et une faiblesse musculaire.

Quel est l’Intérêt du dépistage précoce?

Grace au dépistage, de nombreux cancers du sein peuvent être décelés à un stade précoce. La détection précoce permet d’atteindre de très hauts taux de guérison tout en réduisant considérablement la lourdeur et l’agressivité des traitements appliqués.

Grâce aux progrès constants réalisés par la médecine au Maroc, aux nouvelles molécules de plus en plus innovantes,  à la très haute technologie, le cancer du sein est mieux pris en charge, mieux soigné par des traitements moins agressifs, entrainant moins de séquelles. Plus une femme est sensibilisée, bien informée, plus elle saura tout l’intérêt du dépistage précoce qui constitue l’une des armes les plus efficaces contre le cancer du sein.

De ce fait, on comprend dès lors toute l’importance que revêt la campagne de sensibilisation qui est organisée tout au long du mois d’octobre  et ce, grâce au précieux et inestimable concours de la fondation Lalla Salma de lutte contre le cancer. Depuis 2005, date de création de la fondation Lalla Salma de lutte contre le cancer, nous pouvons dire que la perception du cancer au Maroc a totalement changé. Mieux pris en charge, le cancer est devenu une maladie comme une autre. La fondation Lalla Salma met à la disposition des patients des traitements innovants  gratuitement surtout pour les malades démunis. La construction des maisons de vie offre un cadre agréable pour les malades et leurs familles.  En outre, grâce aux campagnes de dépistage du cancer, des consultations,  des examens, des biopsies et  des  mammographie sont organisés  au niveau de toutes les régions du Maroc gratuitement et profitent en premier lieu aux femmes qui sont économiquement démunies, aux pauvres, aux veuves. Mais au-delà, il y a aussi l’approche préventive qui consiste à diminuer et restreindre les risques de cancer du sein chez la femme et ce, grâce à l’adoption d’une bonne hygiène de vie, d’une alimentation saine et équilibrée et  la pratique régulière d’une activité physique.

Parlez-nous des traitements du cancer du sein

Il y a principalement deux types de traitements : locaux et généraux. Ils sont souvent associés. La chirurgie et la radiothérapie ciblent la tumeur dans le sein et les ganglions. La chirurgie permet d’enlever tout ou une partie du sein, selon la taille de la tumeur. La radiothérapie utilise des rayons X pour bloquer la capacité des cellules cancéreuses à se multiplier et finalement les tuer.

Traitements généraux : la chimiothérapie et l’hormonothérapie sont des traitements qui agissent dans tout l’organisme. La cure de chimiothérapie peut se faire à l’hôpital ou à domicile. Elle consiste en l’administration, par perfusion, de plusieurs médicaments associés. L’hormonothérapie empêche l’action des hormones féminines, les œstrogènes, susceptibles dans certains types de cancers du sein, de stimuler la croissance des cellules cancéreuses. Généralement, le traitement démarre par une chirurgie.

A ce propos, qu’en est-il du traitement chirurgical?

La chirurgie reste le socle de départ pour le traitement. Il est évident quand on a un cancer, que ce qui compte le plus c’est d’abord d’enlever ce cancer et c’est la chirurgie qui se charge de réaliser ce travail. Ce qu’il faut savoir c’est qu’aujourd’hui, on a réalisé d’énormes progrès en termes de réduction de morbidité et de satisfactions de nos patients. En ce qui concerne la chirurgie du sein, on arrive à réaliser des fragments conservateurs avec des résultats esthétiques qui sont très satisfaisants. Notre but est de préserver toujours la silhouette et la féminité des patientes atteintes de cancer du sein.

Après la chirurgie et les différents traitements, la femme peut reprendre une vie normale et avoir des activités, car le cancer du sein est une maladie qui se soigne bien. Aujourd’hui, nos patientes supportent mieux la maladie grâce aux mesures d’accompagnement physique et de soutien psychologique mises en place au niveau des différentes structures sanitaires, tant publiques que privées. Le regard porté par la société sur le cancer du sein a lui aussi évolué. Moins tabou, il se raconte entre membres de la famille, entre amies. Il est présent dans les débats sur les réseaux sociaux. Des patientes n’hésitent pas à confier leur vécu, partagent leur expérience.   Ce qui était impensable il y a encore  quelques années. Il faut savoir qu’après un cancer, la vie continue.

Peut- on prévenir le cancer du sein?

Vous savez, il y a un adage qui dit : «mieux vaut prévenir que guérir». Dans le cas du cancer, il démontre si besoin est toute son importance. Il y a effectivement beaucoup à faire en termes de prévention. C’est le cas de la lutte contre certains facteurs de risque du cancer du sein sur lesquels il est possible d’agir.

Il y a aussi les bonnes habitudes de vie (exercice physique, saine alimentation comprenant suffisamment de légumes et de fruits, arrêt du tabagisme et de la consommation d’alcool..) et le maintien d’un poids santé qui contribuent à réduire le risque de plusieurs types de cancers, incluant le cancer du sein. Bien entendu, la lutte contre le cancer ne requiert pas seulement des actions individuelles, mais aussi des actions collectives qui visent à réduire la présence de produits chimiques dans les produits ménagers, réduire l’emploi de pesticides chimiques, aménager les villes afin de favoriser la pratique de l’activité physique dans des espaces verts, ce qui nous manque aujourd’hui cruellement surtout au niveau des grandes villes dont bien entendu la ville de Casablanca .Et surtout consulter le médecin traitant au moins une fois par an.

Ouardirhi Abdelaziz

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