Protection du consommateur: une responsabilité partagée

La première édition du Moroccan Consumer Day organisée, le 15 mars à Casablanca, sous le thème «protection du consommateur : levier  de développement économique et social de l’entreprise»  a permis de mettre le point sur la responsabilité partagée entre l’Etat, le consommateur et le fournisseur  pour une meilleure garantie des droits du consommateur. L’accélération de la réforme de la loi 31/08 est de mise de même qu’une forte implication de toutes les instances de  contrôle des circuits de distribution, de conditionnement et de commercialisation des produits et des services. Une meilleure transparence des voies de recours et de réclamation est par ailleurs vivement recommandée, sans oublier que tout le monde s’accorde à dire que le meilleur contrôleur reste le consommateur lui-même.

L’économie informelle

Les chiffres révèlent l’urgence d’une plus forte implication de tous les acteurs pour maitriser les risques liés au défaut de qualité et de contrôle et ses effets sur la santé du citoyen. L’économie informelle représente plus de 40% du PIB National, soit 410 milliards de dirhams par an (chiffres du HCP). La contrefaçon représente quant à elle 6 à 12 milliards de dirhams par an et la contrebande, 15 milliards de dirhams par an. Le président de Uni conso, Wadie Madih, s’est dit inquiet par rapport à l’impact direct de cet état de faits sur le consommateur, l’économie, le fisc et la société. La prépondérance de l’informel  dans l’économie nationale  est trop risquée pour la santé et la sécurité alimentaire du citoyen. Dans son intervention lors de cette première édition du Moroccan Day, Madih rappelle que le consommateur, le fournisseur et le gouvernement sont tous responsables et se doivent de travailler ensemble pour  protéger le consommateur. Il a aussi expliqué les principes directeurs et les éléments clés de protection des consommateurs comme définis par les Nations Unis. Parmi ces éléments clés figurent la formation, la mise en place des mécanismes de résolution des litiges, la mesure de satisfaction du consommateur, la mise en place des normes de qualité et de sécurité  et la bonne distribution et commercialisation.

En guise de recommandations pour les consommateurs, le président d’Uniconso estime que le consommateur doit être averti, actif, solidaire et socialement et écologiquement responsable pour défendre ses droits.

Pour le gouvernement, il s’agit d’abord de mettre en place les lois de protection du consommateur combinées à des contrats de ventes clairs et équitables.  Il en est de même pour l’adoption d’un processus  efficace de traitement des réclamations et un système transparent de confirmation et de traitement des retours et remboursements. L’Etat  est invité aussi à adopter un mode de paiement sécurisé, a-t-il rétorqué.

L’entreprise, pour sa part, doit adopter les bonnes pratiques commerciales, un traitement équitable des consommateurs et une formation précise sur le bien et le service. Il est aussi question de contrôler les conditions de vente avec toute l’assistance  et le conseil nécessaires et mettre en place un système de règlement efficace.

Pour une approche partenariale et transparente

 Pour Omar Benaicha, l’approche partenariale transparente et fiable s’impose pour l’entreprise. Cette dernière doit plus que jamais s’inscrire dans cette dynamique basée sur la RSE et le respect des normes de qualité pour intégrer la protection du consommateur  en tant que levier de croissance. De son avis, l’entreprise a besoin du consommateur et se doit de développer une relation de confiance pour dépasser la crise de confiance qui prévaut actuellement.  Elle est tenue de rendre des comptes aux consommateurs.

Ce représentant du bureau Veritas rappelle que la démarche RSE garantit la fiabilité de  l’information donnée aux clients (étiquetage) et le respect de la loi 31/08 sur la protection du consommateur. Cette démarche permet aussi un bon traitement des réclamations et des litiges  et favorise la  protection des données personnelles.  Benaicha, explique,  qu’avec tout cela, on devrait  avoir des clients plus satisfaits et mieux sécurisés.

L’ONSSA dispose de tous les outils réglementaires pour agir

Dans son intervention, le Dr Lachhab Hamid, Directeur de l’Evaluation des Risques et des Affaires Juridiques à l’Office National de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), a expliqué que l’office joue un rôle de premier plan pour la protection du consommateur et ce, conformément à la politique du gouvernement.  Le travail commence en amont par la protection des animaux et l’homologation et le contrôle de tous les intrants. L’office, indique Lachhab, dispose de tous les outils pour bien faire son travail, soit plus de 280 textes réglementaires et procédures et un bon nombre de laboratoires d’investigation avec les compétences humaines nécessaires. De son avis, les entreprises sont à cheval sur le respect des conditions des chaines de froid et de conditionnement. Le consommateur assume ses responsabilités en cas de non respect des conditions de conditionnement quand il achète des produits sensibles et périssables qui ne respectent pas ces conditions.

Les réclamations restent trop faibles

Pour sa part, Mounir Jazouli, président du Groupement des annonceurs du Maroc, souligne que la culture du consumérisme est récente et encore jeune  et devrait connaitre une croissance. Pour lui, l’évolution technologique a transformé la relation entre les marques et  le client. Le développement  d’un écosystème qui agit sur cette relation fait que le consommateur a plus de pouvoirs. Trois raisons justifient cette situation : le client a le choix entre les différentes marques, l’information devient accessible et rapide et les voix de recours  sont devenues multilatérales. Néanmoins, Jazouli regrette qu’au Maroc, le consommateur n’utilise pas encore ces trois leviers et que même les réclamations restent très faibles.

Il regrette aussi la faible implication du consommateur dans le travail mené par les associations de défense du droit des consommateurs. La loi 31-08 a connu ses limites et le défaut de certains textes réglementaires  est réel, d’où l’urgence de réformer la loi sur la protection du consommateur.

Affaire  du thé marocain

Dr Lachhab est revenu sur l’affaire de l’existence des résidus toxiques dans le thé marocain. Il a précisé que l’ONSSA était très clair et les communiqués de presse de l’Office l’ont confirmé : le thé consommé et importé  au Maroc passe par un processus de contrôle renforcé. Depuis la création de l’ONSSA et la mise en œuvre d’un cadre réglementaire à l’échelle nationale, un arrêté conjoint entre le ministère de l’agriculture et celui de la santé a fixé les LMR (limites maximales des résidus de pesticides) et a donné les bases d’interprétations des résultats. «Je rappelle que lorsque les LMR ne dépassent pas les seuils fixés légalement, elles passent par un processus scientifique au niveau des experts indépendants qui prennent toutes les précautions  nécessaires  pour que les résultats d’analyse de fixation de ces LMR soient les plus sûrs  pour la santé du consommateur.  Ces résultats sont divisés par un coefficient de 100 à 1000 pour prendre en considération ce facteur de risque pour le consommateur», a-t-il expliqué.

La comparaison des analyses du thé marocain par rapport aux normes  de l’Union Européenne n’est pas une méthode scientifique. Le LMR au niveau du l’UE est 0,05%  ppm. Les USA ont fixé dernièrement  la teneur de cette substance à 50% PPM, soit 1000 fois supérieurs aux normes européennes et 600 fois supérieurs pour le Japon qui la fixe à 30% PPM… Comparer les LMR à l’UE n’était pas donc la bonne méthode… D’ailleurs, je confirme qu’à ce jour, aucun cas d’intoxication à cause du thé n’a été signalé  au Maroc. Nous avons effectué des analyses sur les infusions de thé  marocain et je certifie  qu’il y’a zéro trace de résidus sur 14 expérimentations.  Je rappelle que la substance qui a été trouvée et incriminée comme toxique  par certains  est l’acide citrique.

Fairouz EL Mouden

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