Violence dans les hôpitaux: Une situation intenable

L’hôpital public tel que nous l’avons toujours connu, fréquenté, sollicité en cas de maladies, de souffrances…est un lieu de respect, de considération, de reconnaissance et d’admiration pour le rôle inestimable qu’il joue et l’image qu’il incarne au sein de la société. Cette image, cette réalité est aujourd’hui écornée, confrontée à de rudes épreuves, mise à mal à cause des tensions et de la violence quasi quotidienne dont sont victimes les professionnels de santé de différents hôpitaux.

Encore une violence à l’intérieur de l’hôpital, une de plus, une de trop. Cette énième agression s’est produite dans l’hôpital Mohammed V à El Jadida, dans la soirée du jeudi 9 aout 2018.

Trois membres de la famille de la patiente F.K (16 ans) se sont attaqués au service des urgences de l’établissement hospitalier Mohamed V. Ces individus se sont livrés à des actes de vandalisme ayant entraîné la dégradation d’une fenêtre et de divers équipements et ont agressé le personnel assurant la permanence. Un médecin a été atteint d’une luxation d’épaule alors que des infirmiers et une femme de ménage ont subi des coups et blessures.

Ferme condamnation du ministère de la santé

De nombreux incidents ont été relatés ces derniers jours par les médias et qui ont fait réagir toutes les parties concernées, notamment le ministère de la Santé. Ce dernier a fermement dénoncé les actes d’agressions répétitifs visant le personnel médical, administratif et technique opérant dans les établissements de santé. La sécurité en milieu hospitalier revient au cœur de l’actualité avec l’agression dont ont été victimes des infirmières et infirmiers ainsi que des médecins, dernièrement au niveau du service des urgences de l’hôpital de la ville d’El Jadida. Pour le ministère de la Santé, de tels actes sont inacceptables. Le 28 Juillet 2018, nous avons soulevé le problème de la recrudescence de la violence au niveau des hôpitaux, et plus particulièrement au niveau des services d’urgences.

La situation ne fait qu’empirer, la violence est bel et bien un phénomène très préoccupant comme nous l’avons déjà souligné. Aujourd’hui, on ne peut s’empêcher de reconnaitre que la violence au sein des hôpitaux, à l’intérieur des services des urgences fait partie du quotidien des professionnels de santé (médecins – infirmiers).

Tous concernés par la sécurité de nos hôpitaux

Ce n’est pas une vue de l’esprit, loin s’en faut. C’est une réalité traumatisante, douloureuse et choquante, une réalité qui nous interpelle tous, car nous sommes tous concernés par la sécurité qui doit prévaloir à l’intérieur de nos structures hospitalières. Soulever cette problématique de la violence au sein des hôpitaux, de la recrudescence des agressions dont sont victimes les professionnels de santé (médecins – infirmiers), dans l’exercice de leur fonction, n’est pas en soi quelque chose de nouveau. C’est un phénomène qui est étroitement lié à la violence quotidienne, qui prévaut dans nos villes, dans nos quartiers, dans nos terrains de Foot…

Ces actes de violence, ces agressions qui surviennent au sein même des établissements sanitaires, s’expriment généralement par des actes d’incivisme, des insultes, des injures, des menaces, et parfois par des coups dont les premiers à souffrir sont les professionnels de santé qui paient un lourd tribut

L’agression qui s’est produite dans l’hôpital Mohammed V à El Jadida, dans la soirée du jeudi 9 aout 2018, vient nous rappeler si besoin est que la violence urbaine pénètre désormais les portes de l’hôpital.

Les services de soins sont de plus en plus confrontés à des tensions avec les patients ou proches de ces mêmes patients qui s’adressent à l’hôpital, aux médecins, aux infirmiers pour des soins, mais face à la violence et aux agressions dont il est victime, l’hôpital se trouve face à un paradoxe : rester ouvert conformément à sa tradition d’accueil, de soins, ou se refermer sur lui-même pour protéger ses médecins et infirmiers et les malades dont il a la charge.

Charge de travail soutenue

Les citoyens doivent savoir que l’ensemble des services d’urgences hospitalières connaissent des moments difficiles, plus particulièrement en ce moment précis de l’année qui coïncide avec la période estivale ; les plages, les fast-foods, les snacks et autres lieux de restaurations rapides sont pris d’assaut. Les routes sont très fréquentées par les automobilistes … Tous ces éléments concourent à un flux très important de malades ou d’accidentés qui se dirigent prioritairement vers les services d’urgences les plus proches.

Les statistiques du ministère de la santé démontrent chiffres à l’appui que pratiquement tous les services des urgences des hôpitaux publics (SEGMA) enregistrent une fréquentation particulièrement soutenue, jusqu’à 250, voire même 300 passages par jour, soit deux fois plus que ce que ces services peuvent théoriquement accueillir.

Pour certains centres hospitaliers universitaires (CHU), le nombre de patients vus aux urgences peut atteindre 500 par jour.

Faire face aux urgences vitales

On comprend dès lors mieux que les professionnels de santé (médecins – infirmiers) font face à une charge de travail soutenue, avec des moyens parfois limités. En effet, aujourd’hui tout un chacun comprend que les services d’urgences font ce qu’ils peuvent, souvent dans des conditions difficiles, avec les moyens dont ils disposent. Les citoyens ne veulent rien comprendre, ni entendre ; tout ce qu’ils désirent une fois aux urgences, c’est être pris en charge immédiatement, même quand il s’agit des bobos qui ne méritent pas d’être soignés aux urgences.

Pour le personnel de santé (médecins -infirmiers), ce qui compte le plus ce sont les urgences vitales qui ne peuvent attendre. Résultat, les délais d’attente pour une injection, un mal de dent, une légère brulure de peau ou une fièvre à 38°, peuvent  atteindre  parfois plus de 2  heures, ce qui entraine  des tensions.

Se sentir en sécurité à l’hôpital

Dans un communiqué en date du 10 aout 2018, le ministère de la santé a condamné ces agressions répétitives contre les professionnels de santé et  a décidé de poursuivre en justice les agresseurs. Tout en réaffirmant son soutien aux cadres et membres du personnel des établissements de santé victimes de telles agressions flagrantes, le département se dit déterminé à entreprendre les démarches nécessaires pour poursuivre les auteurs de ces délits, assurant qu’il ne ménagera aucun effort pour défendre la dignité des professionnels de la santé.

Le ministère de la Santé affirme également qu’il ne peut tolérer aucun acte portant préjudice aux cadres de la santé ou dirigé contre les établissements hospitaliers, quels qu’en soient les auteurs.

Aujourd’hui, il n’est plus permis de rester les bras croisés et de regarder en spectateurs passifs ce qui se déroule sous nos yeux au moment où les professionnels de santé, toutes catégories et grades confondus ne cessent de tirer la sonnette d’alarme sur cette dérive.

Il s’agit aujourd’hui d’assurer aux hôpitaux un accompagnement des pouvoirs publics pour faire face à ce type de situation, avec la présence de forces de police sur place, de jour comme de nuit, et plus particulièrement au niveau des urgences. Les malades, les médecins et les infirmiers désirent légitimement se sentir en sécurité à l’hôpital, c’est leur droit le plus absolu et en tant que tel, l’état doit répondre au mieux à cette demande légitime.

Ouardirhi Abdelaziz

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