La pastèque et le baril

par Mustapha Labraimi

Plus que la propagation du covid-19 devant le confinement quand il est respecté, l’image est devenue virale: une pastèque et un baril de pétrole qui se côtoient avec l’annonce de leur prix coûtant.

La pastèque valait plus que le baril du pétrole! Á la fin du souk prévue le 21 avril, le brut étasunien est devenu une marchandise dont l’offre dépassait de beaucoup la demande. Négocié à des prix très bas, personne n’en voulait plus car son transport et son stockage seraient plus coûteux. Pire, la chute brutale du prix du brut étasunien allait jusqu’à le rendre négatif.

En plus des positions politiques des autres producteurs de pétrole, l’activité industrielle de la planète est en arrêt. Ainsi et telle une onde de volume produite par un séisme, cet événement se propage à travers les médias et crée « un grondement » qui annonce la globalisation de la crise.

Qu’en adviendra-t-il de ce choc pétrolier dans les jours qui vont suivre ? Quelles conséquences pour les pays producteurs dont l’économie est basée totalement ou presque sur la production pétrolière ? Quelles conséquences pour les pays  consommateurs dont le budget est accablé par une facture énergétique consistante ? Quels seraient les effets de cette géopolitique de l’abondance sur les majors de la production de l’énergie fossile et sur la paix dans le monde ? Et le plastique, matériau qui se retrouve partout, dans tout cela ? Des questions, et d’autres,  qui vont alimenter le débat sans que les traders n’arrêtent de subir ; et non pour le prix de la pastèque !

Le débat porte sur les modalités du déconfinement  et sur l’après-covid 19. La maîtrise de la propagation de l’épidémie est en bonne voie d’être assurée malgré l’existence de foyers localisés révélant les dysfonctionnements qui caractérisent notre société.  Les probables changements qui seraient initiés sont abordés avec une prudence et une timidité qui augurent beaucoup plus des ajustements par petites touches que des bouleversements permettant de résoudre les problèmes apparus «en prenant le taureau par les cornes».

La cause en serait dans l’interdépendance des économies telles qu’elles sont, l’état du monde et la complexité des relations géopolitiques, l’opacité du proche avenir et l’absence d’une concertation multilatérale organisée pour aboutir à des consensus préservant la paix dans le monde et la généralisation du bienêtre social. La préservation de certains intérêts y est aussi pour quelque chose ; car Il faut oser le dire, le militantisme ne motive plus. La confiance reste à construire entre les hommes et les femmes qui voudraient assurer la représentation de la population pour faire la politique autrement et changer la société.

Dans l’attente ; notre beau pays, comme la pastèque, a des besoins importants en eau. Et des barils de pétrole il lui en faut. La ressource en eau régit une grande partie de l’économie nationale et détermine sa performance par une contribution plus ou moins importante selon qu’elle soit abondante ou qu’elle se fasse rare. Beaucoup d’eau s’exporte par le biais d’une agriculture orientée vers l’extérieur sans que pour cela notre sécurité alimentaire ne soit assurée ni même notre balance commerciale équilibrée.

Les inégalités sociales sont plus criantes dans le monde rural et les conditions de vie y restent précaires. Autant pour la ressource énergétique qui constitue une contrainte majeure pour le développement durable du royaume. Une contrainte par sa nature (fossile, renouvelable, nucléaire), son coût et son impact sur l’environnement.

Que de problématiques peuvent être traitées à partir de cette image populaire de la pastèque et du baril de pétrole! Voulait-on  exprimer par ce biais une certaine satisfaction de disposer d’un fruit de la nature pour son alimentation alors que le baril, dans son état brut, ne le permettait pas. Société de l’immédiateté sans clairvoyance des termes du temps dans lesquels elle évolue? Préférence du présent au détriment du futur dans le bon sens populaire? Ou simplement, dans ce confinement imposé à tous où on se recherche et où, entre l’avant et l’après, les fondements s’affirment plus qu’en un autre temps, la pastèque ne cherche-t-elle pas à signifier un message de bon voisinage au baril qui la côtoie?

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