Bulgarie: Le président réclame la démission du gouvernement «mafieux»

Nabil El Bousaadi

«Un consensus national anti-mafia s’est formé. L’Europe n’a pas le droit de détourner son regard de la Bulgarie. L’Union européenne a besoin d’une Bulgarie démocratique (…) Le caractère mafieux du gouvernement [de Boïco Borissov, conservateur] a poussé les bulgares de tous âges et de diverses tendances politiques à réclamer un respect de la loi».

C’est ce qu’a déclaré, ce samedi, dans un «appel à la nation» diffusé à la télévision, le président bulgare Roumen Radev,  proche des socialistes et très critique à l’endroit du Premier ministre qu’il accuse d’être trop proche de certains oligarques. Aussi, pour le chef de l’Etat, «la seule solution est une démission du gouvernement et du procureur général» auxquels il reproche de s’adonner au «racket» et de bafouer «la présomption d’innocence».

En cause, les perquisitions effectuées jeudi, au siège de la présidence, sur ordre du parquet «instrumentalisé par le Premier ministre» et qui ont donné lieu à l’arrestation de deux conseillers du président. Le premier a été inculpé de «trafic d’influence» au motif qu’il aurait servi d’intermédiaire entre le chef de l’Etat et un homme d’affaire réputé «sulfureux» et le second a été accusé de s’être «approprié» de documents appartenant aux services de renseignement.

Ces perquisitions ayant été assimilées par l’opposition à une déclaration de guerre contre le chef de l’Etat, des protestataires ont, dès le lendemain, investi les rues de Sofia pour soutenir le président et son entourage et s’opposer au chef du gouvernement, à son ministre de la justice et au procureur général tous accusés de prêter main-forte à une oligarchie «mafieuse». Ces manifestations se sont soldées par 18 interpellations et six blessés dont quatre issus des rangs des forces de l’ordre et deux parmi les contestataires.

Et si, samedi et pour le troisième jour consécutif, des barrages routiers entravaient encore la circulation sur les axes majeurs de Sofia, la capitale du pays, et que les manifestants qui récusaient les «violences policières» scandaient à l’unisson «Mafia !», «Assassins !», «Démission!» à l’intention du gouvernement, il y a lieu de signaler, également, que, pour dénoncer la corruption pratiquée par le gouvernement de Borissov et concrétisée, très souvent, par la «bétonisation du littoral», des centaines de manifestants ont envahi une plage du bord de la Mer Noire interdite au public depuis qu’un proche du chef du gouvernement avait, unilatéralement, décidé de la «privatiser» à son seul profit.

D’ailleurs, depuis son entrée au sein de l’Union Européenne en 2007, la Bulgarie est régulièrement montrée du doigt et réprimandée par cette dernière pour son incapacité à mettre un terme à la corruption qui gangrène ce pays de 7,1 millions d’habitants et qui, selon Transparency International, le placerait «au dernier rang des 27 dans la perception de la corruption ambiante».

Affublé du surnom d’«Al Capone bulgare» après avoir été souvent accusé d’avoir trempé dans des affaires plutôt « louches» et dont la principale serait qu’il aurait lui-même fourni, aux jihadistes d’Al Qaïda stationnées en Libye, du «Captagon», cette drogue de synthèse qui permettrait de manipuler aisément les combattants et de les rendre plus effrayants, le Premier ministre bulgare, Boïko Borissov, réussira-t-il à se maintenir au pouvoir en dépit de l’opposition du président Roumen Radev? Rien n’est moins sûr au vu du soutien, clair et sans équivoque, apporté par les bulgares à leur président mais attendons pour voir…

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