Venezuela: Maduro gracie ses opposants

Nabil El Bousaadi

Soucieux de promouvoir la réconciliation nationale avant les élections prévues le 6 décembre prochain au titre du renouvellement des 167 députés de l’Assemblée nationale, le président vénézuélien Nicolas Maduro qui, en dépit de sa réélection contestée de 2018, jouit encore du soutien de Cuba, la Chine et la Russie a fait un grand pas en direction de l’opposition en graciant plus d’une centaine d’opposants en vertu d’un décret présidentiel entrant en vigueur dès sa publication.

C’est ce qui ressort de la déclaration faite par Jorge Rodriguez, le ministre vénézuélien de la Communication, pendant une conférence de presse diffusée, ce lundi, par la télévision d’Etat et au cours de laquelle ce dernier a énuméré les noms des bénéficiaires.

Mais il convient de préciser que cette annonce intervient trois mois à peine avant les prochaines échéances électorales que Juan Guaido, reconnu en tant président par intérim du Venezuela par prés d’une soixantaine de  pays, ainsi que les principaux partis d’opposition prévoyaient de boycotter en étant persuadés que du moment qu’elles seront organisées par les autorités chavistes, elles ne peuvent qu’être entachées de fraudes

Exclu de cette faveur, le chef de file de l’opposition, Juan Guaido, poursuivi par la justice vénézuélienne dans plus d’une demi-douzaine d’affaires dont la plus importante reste son appel au soulèvement armé contre Nicolas Maduro le 30 Avril 2019, considère la mesure prise par le président comme étant une simple «monnaie d’échange (pour) légitimer la farce» que constitue la prochaine consultation législative. 

Aussi, en l’absence du président «auto-proclamé» du Venezuela, la figure la plus emblématique figurant sur cette liste reste, toutefois, Roberto Marrero, son chef de cabinet qui avait été incarcéré pour «terrorisme» en mars 2019 – deux mois après que Juan Guaido se soit autoproclamé président – et qui a été libéré ce lundi soir en même temps que d’autres opposants dont les parlementaires Gilber Caro et Renzo Prieto et l’avocate Antonia Turbay, tous farouchement  hostiles au président Maduro.

Parmi les graciés figurent également des personnes qui, bien que tombant sous le coup de poursuites pénales n’étaient pas incarcérées. C’est le cas notamment de Henry Ramos Allup, une figure de l’opposition et du député Luis Florido qui avait choisi l’ exil.

Freddy Guevara du parti «Volontad Popular» (Volonté Populaire) de Juan Guaido qui, après avoir été à la pointe des manifestations anti-gouvernementales qui s’étaient soldées par la mort de plus de 125 personnes, s’était réfugié, en Novembre 2017 dans les locaux de l’ambassade du Chili à Caracas a, lui aussi, bénéficié de cette grâce présidentielle.

Et si le président Maduro a déclaré, dimanche dernier, vouloir mettre le Venezuela sur le chemin du dialogue et de la réconciliation, Felix Seijas, analyste auprès de l’institut de sondages «Delphos», estime, de son côté, que, par la grâce présidentielle qu’il a accordée à ses opposants, le chef de l’Etat vise à la fois à légitimer les prochaines élections que l’opposition entend boycotter et renouer les liens avec la communauté internationale car, après avoir été soumis aux sanctions américaines, le Venezuela a traversé la pire crise économique de son histoire avec une hyperinflation dépassant les 9000%, d’incessantes pénuries d’essence et de médicaments et un système de santé des plus défaillants.

Enfin, si officiellement, ce sont 46.000 personnes qui, à l’heure de la pandémie, auraient été affectées par le Covid-19 et 381 qui en sont mortes, l’opposition et l’organisation Human Rights Watch récusent ces chiffres et les considèrent comme étant bien en-deçà de la réalité.

Est-il, enfin, permis de croire que ces grâces présidentielles vont, comme le souhaite Nicolas Maduro, mettre le pays sur le chemin du dialogue et de la réconciliation et y ramener la paix et la concorde ? Attendons pour voir…

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