D’un système qui éjecte les paresseux à un autre qui en forme

B. Amenzou

C’est un constat. Dans le temps, d’aucuns casquaient dans le privé pour y «caser» des paresseux exclus du système public dans une ultime tentative de sauver l’échec scolaire.  Aujourd’hui, on casque encore plus cher dans certains établissements du privé pour former des paresseux.

C’est du moins ce que plusieurs parents ont découvert, à leur grande surprise, durant la période du confinement. On leur vendait une image artificielle via des notes gonflées pour leur faire croire que leurs enfants apprenaient et se formaient dans les règles de l’art.

Du coup, des parents croyaient que la note de «19/20» envoyée sur le bulletin de l’élève et appuyée par d’excellentes appréciations aurait la même valeur que celle des temps où les paresseux étaient exclus du système. A l’époque, la moyenne était un critère pour distinguer les meilleurs et les moins bons élèves dans un espace éducatif caractérisé par la transparence et l’égalité des chances. Aujourd’hui, l’inflation des notes dans le privé pose un problème.

Le phénomène fausse la donne sur toute la ligne. Ainsi, ni la moyenne renseigne plus sur le niveau réel de l’apprenant, ni l’égalité des chances est restée de mise dans un espace où elle devait être la règle. Alors que l’égalité des chances est une vision qui est implicitement contenue dans l’égalité des droits.

Cela a été pourtant théorisé dès l’Antiquité par Aristote, avant d’occuper une place centrale dans la conception de l’égalité développée il y a plus de deux siècles par les pères fondateurs de la démocratie d’aujourd’hui. En fait, pour assurer cette égalité, il faut garantir une égalité de l’offre scolaire par une école juste.

Celle-ci devait être une institution qui distingue le mérite de chacun indépendamment de sa naissance ou de son origine sociale ou ethnique, de son sexe, des moyens financiers de ses parents, de leur conviction religieuse ou d’un éventuel handicap. Cette conception du mérite permettra ainsi à chacun d’accéder à des positions inégales au terme d’une compétition équitable dans laquelle des citoyens égaux s’affrontent pour occuper des places sociales hiérarchisées.

D’ailleurs, l’égalité des chances et l’égalité des places sont des piliers fondamentaux de la justice sociale. Ce que des acteurs ne cessent de souligner, sans avoir froid aux yeux quand leurs actions les démentent. La dernière sortie hasardeuse du ministre de l’éducation nationale en dit long dans ce cadre.

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